Le quartier des tanneurs est le lieu où se pratique l’art de travailler la peau pour en faire du cuir.
Pour ceux qui n’y sont pas encore arrivés, la tannerie de Maroua est un vaste espace qui rassemble plus de 150 artisanats. Très tôt le matin, le milieu se rempli de ses artiste d’un autre genre et devient brouillant. Saturé des cuves de fermentation remplies d’eau de diverses couleur, le site a tout l’air d’un champ de bataille. L’odeur est forte et il se dégage des senteurs chimiques. Elles proviennent de la décomposition des peaux de bête, mais aussi des eaux usées de la Sodecotondrainées par la rivière Mayo Dada Mama. Loin de toutes ces impressions de façade, la tannerie dévoile son savoir-faire ancestral. Quoi qu’on puisse dire, tanner la peau est un art. Lespeauxde vaches, chèvres, moutons et autres bêtes sont soigneusement polies par des experts en la matière. Une industrie artisanale complexe qui nécessite un véritable concours de patience. Les peaux achetées ou acheminées qui atterrissent à la tannerie subissent un processus bien particulier avant de devenir du cuir.
A la base les peaux subissent un séchage à froid et non au soleil, dans un hangar aménagé à cet effet.Les graisses sont ainsi préservées à l’état afin d’être entièrement éliminées. Par la suite, elles sont trempées dans des bacs contenant un mélange d’eau chaude avec du Natron ou de la cendre, soit dans de la chaux vive. Cette étape qui dure 72 heures en moyenne consiste à ramollir la matière. Le processus permet d’enlever aisément les poils lors du raclage. Plus rapide encore, le trempage moderne ne dure que 6 heures à l’aide de la soude caustique. Cette deuxième étapepassée, les peaux sont plongées dans un mélange d’eau et d’excréments d’oiseaux puisés en quantité dans la nature. Le troisième rinçage s’effectue dans un mélange de fruits d’acacia pillés durant 4 bonnes heures avant le raclage de la graisse. Puis vient le séchage sur des cordes tendues un peu partout dans cet espace.
Aprèsle séchage, vient la dernière touche du maître tanneur qui est le «tirage». L’ultime étape se fait à l’aided’un bâton pour la rendre malléable dans les ateliers d’artisans. Les amoureux des couleurs peuvent se permettre des fantaisies à travers diverses teinturesavant la livraison du produit.Deux méthodes de teinture sont courantes. La méthode chimique ou celletraditionnelle faite à base d’écorce d’arbre.La teinture noire s’obtient par un mélange d’oxyde de fer, de peau de banane, de noyaux de mangue, des os pendant 72 heures. Le séchage réalisé, les peaux peuvent alors servir à confectionner des sacs, samaras, tapis, poufs, coussins et autres objets artisanaux que s’arrachent les touristes.Les résidus de l’activité ne se perdent pas pour autant. Les poils sont utilisés pour la fabrication de briques de terre dites résistantes aux intempéries. Quand aux détritus des graines d’acacia, les populations s’en serventdans l’agriculture.