L’une de mes priorités quand je m’apprêtais à me rendre à Paris était de voir en live le ‘Kelin-Kelin Orchestra’. Ce projet artistique mis en orbite par le batteur Brice Wassy et le saxophoniste Jean-Jacques Elangué. Deux musiciens camerounais de générations différentes qui ont chacun su donner à la musique camerounaise sa part d’aura, surtout dans les cercles du jazz. Je le souhaitais d’autant plus que jusqu’ici, je n’avais encore eu l’occasion de voir en direct un orchestre aussi imposant.
Hier soir donc à l’invitation de Brice Wassy, je suis allé au Baiser Salé, rue des Lombards pas loin de la station de métro Chatelet. Avant le spectacle, j’y ai d’abord croisé quelques membres du groupe que je connaissais de réputation comme Roger Kom, tromboniste, Kayou Roots, saxophoniste et clarinettiste comme j’allais le découvrir plus tard, Willy Ombe, percussionniste, et bien sûr les deux encadreurs de ce kelin-Kelin. On a échangé sur le pays. Puis j’ai croisé Tony Mefé qui a le don de rendre les moments sympathiques avec son art de la parole ancré dans nos arts de vivre à Yaoundé. Avec lui et l’aîné Jean-François Channon, on a évoqué cette époque bénie du journalisme culturel et des grands événements culturels à Yaoundé au tournant des années 2000. On a disséqué les causes du relâchement de cette émulation dans le secteur et les possibles perspectives. Le tout autour d’une bière. Des rencontres comme celles-là me sont indispensables vu qu’ils me permettent de mettre à jour mes connaissances et de mieux appréhender l’instant présent dans mon métier de journaliste culturel.
Puis j’ai croisé Serge Maboma, thierry Sandio, Alain Oyono et le fils de Steve Ndzana qui accompagnent le géant Youssou Ndour pour son concert à Bercy ce samedi. Si on n’a pas beaucoup échangé, on se reverra au pays pour cela, j’en ai profité pour savoir si je pouvais avoir un ticket de ce spectacle qui marque le retour sur scène de l’ancien ministre sénégalais de la Culture. Un concert à 46 euros, avouez que c’est pas facile pour un étudiant boursier à Paris tout de même !
C’est à 22h que nous sommes montés dans la salle de spectacle. Une salle toute petite avec un podium tout aussi petit. Pas moyen ici pour les artistes de se défausser ou de faire semblant. Sur la scène, onze musiciens dont sept rien que pour la section cuivres (trois saxo, deux trombo, deux trompet). Le reste de l’équipée se compose d’un batteur d’un bassiste et d’un pianiste. Les affaires sérieuses commencent et tout de suite, on est saisi par la fluidité des notes. L’orchestre semble rôdé et les solos s’enchaînent. Deux musiciens m’impressionnent au fil du spectacle : le bassiste et le pianiste. Deux jeunes dont le jeu varie et s’accommode des différents univers convoqués par les compositions. Je serais d’ailleurs tétanisé à l’écoute de la version de Wassy du fameux ‘Soul makossa’ dont je cherche encore les bases rythmiques. C’est avec des titres de cette dimension que je prends conscience de ce qu’il me reste à apprendre pour mieux appréhender le langage des grands maîtres. Une autre de ses compositions dans la foulée va aussi m’entraîner ; il s’agit d’une ambiance des années 70, une sorte de mix de disco et de high life.
Je suis aux anges, surtout que les cuivres résonnent. L’acoustique n’est pas à la hauteur vu que certains sons sont noyés mais le peu qu’il permet renseigne sur la qualité des compositions et du jeu. Je vois là un Cameroun magnifique avec ses fils issues de plusieurs ethnies qui ensemble s’échinent à en découdre avec la fatalité ambiante, faisant fi au passage de ces révisionnistes truculents qui veulent réécrire notre histoire au moyen des origines. A la fin du premier set, la soirée en compte trois, je dois ncependant m’en aller ; sinon je devrais solliciter un taxi, ce que je ne peux me permettre vu mon statut. Je repars donc en promettant de revoir les promoteurs du concept pour en discuter de son origine, de sa substance et de son esthétique.
Pour ce qui est de l’école, la journée d’hier a commencé avec notre nouveau prof. Une dame dont l’art de professer m’a rappelé les ateliers d’écriture. Elle insiste sur des exercices de mémoire couplés aux descentes sur le terrain. Déjà, une idée me vient à l’esprit et que je compte loger dans la nouvelle réflexion que j’affine ces jours derniers sur le journalisme culturel : organiser au Cameroun des ateliers d’écriture journalistique. Une belle idée sur papier sans doute, mais qu’il sera certainement difficile de mettre en œuvre. Pas du fait du manque de financement, mais de l’intérêt qu’il faudra susciter chez des confrères qui ont d’autres repères. Y parviendrons-nous ?
A demain !
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